Publié par CEMO Centre - Paris
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Roland Jacquard
Roland Jacquard

Menaces terroristes : après les « Revenants », les « Sortants » !

mercredi 06/juin/2018 - 03:47
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L’attentat qui a secoué la ville belge de Liège, ce 29 mai 2018, a remis sur le devant de la scène l’une des problématiques les plus exsangues à laquelle les services antiterroristes européens auront à faire face : le prosélytismes djihadistes, qui œuvre à faire des prisons européennes une fabrique de radicalisés.

 

Ainsi, à la redoutable menace des « Revenants » de Daech, s’ajoute la bombe à retardement des « Sortants » de prison ! Un phénomène alarmant qui menace de donner à la violence djihadiste une ampleur inédite. Et le deuxième souffle qui lui fait défaut, pour compenser le reflux dû à l’effondrement de la maison-mère daechienne, dans ses fiefs syro-irakiens.

 

Benjamin Herman, l’auteur de l’attaque de Liège, est un cas d’école qui résume, à lui seul, les problématiques multiformes que soulève la radicalisation carcérale : détenu de droit commun, condamné à 12 ans de prisons, pour des braquages à main armée, il s’est radicalisé en prison, au contact de Yassine Dibi.

 

Ce dernier, lui aussi prisonnier de droit commun, condamné, six ans plutôt, à 32 ans de réclusion, pour vols avec prise d’otages, se radicalise et devient un influent prédicateur djihadiste en milieu carcéral. Parmi ces recrues, deux de ses amis d’enfance, Ibrahim et Khalid El-Bakraoui, les kamikazes des attentats de Bruxelles et de Zaventem, le 22 mars 2016.

 

Condamnés eux aussi pour vols et braquages, les frères El-Bakraoui ont rejoint Daech en Syrie, à leur sortie de prison en 2014, puis sont revenus, l’année suivante, en Europe. Impliqués dans la logistique des attentats de Paris, le 13 novembre 2015, ils ont ensuite perpétré des attentats suicides de Bruxelles-Zaventem.

 

Ainsi, un seul et même prédicateur djihadiste a pu recruter les auteurs de deux vagues d’attaques, celles de Bruxelles-Zaventem et celle de Liège, espacées de plus de plus de deux années ! Preuve, s’il en faut, de l’impuissance des dispositifs mis en place pour contrecarrer le prosélytisme djihadistes dans les prisons.

 

Or, Yassine Dibi est tout sauf un cas isolé. Selon les chiffres du ministère belge de la justice, 450 prisonniers radicalisés ont été répertoriés dans les prisons belges, dont 237 font l’objet de suivi continuel à cause de dangerosité et 46 autres identifiés comme représentant une menace grave, en raison de leur prosélytisme.

 

Ces chiffres précis, détaillés et alarmants n’ont pourtant pas empêché le « ratage » qui a permis à Benjamin Herman d’obtenir la « permission » durant laquelle il a commis son forfait !

 

Et cet inquiétant phénomène n’est pas qu’une particularité belge. En France, la situation est bien plus alarmante encore : les chiffres divulgués, le 28 mai dernier, par le procureur de Paris, François Molins, ont eu l’effet d’une terrifiante prophétie.

 

Il existe dans les prisons françaises 504 détenus condamnés pour des faits de terrorisme. Ce qui ne représente qu’une infime minorité parmi les quelques 70.000 détenus en France. Or, au contact des ces 504 prisonniers djihadistes, plus de 1500 détenus de droit commun se sont radicalisés, durant les trois dernières années.

 

Et comme le souligne le procureur Molins, l’écrasante majorité de ces détenus, condamnés avant 2016, l’ont été pour de courtes peines, car la France n’a « criminalisé » les faits de radicalisation qu’après les attentats de novembre 2015. Ainsi, plus de 500 d’entre-eux sortiront successivement de prison, d’ici 2020.

 

Plus alarmant encore, à ces jeunes pousses djihadistes s’ajoutera une quarantaine de détenus, de la génération précédente, qui ont écopé de peines plus lourdes, une décennie auparavant. Une vingtaine d’entre eux sortira de prison d’ici à la fin de l’année et une vingtaine encore le sera en 2019.

 

Les services antiterroristes redoutent fortement que, dans le capharnaüm djihadiste post-daechien, ces vétérans ne soient amenés à jouer le rôle de « cerveaux » destinés à enrôler et encadrer la masse des « muscles » sortis de prison en même temps qu’eux.

 

Et parmi ces « cerveau », on retrouve des « pointures » telles que Djamel Beghal, le tout premier des « émirs aux yeux bleus » d’al-Qaida, qui fut le mentor des frères Kouachi, plus de dix ans avant qu’ils ne commentent l’attentat sanglant de Charlie-hebdo !          

     

 

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